Jamais deux sans trois. Après le poing levé de Pierre Karl Péladeau,
les yeux ronds de Janette Bertrand, voici le chapeau tendu de Claude
Blanchet.
Comme si la campagne électorale n’avait pas suffisamment dérapé pour
le PQ, la dernière tuile, concernant le financement de la campagne au
leadership de Pauline Marois, risque de faire couler le bateau encore
davantage. Même si le geste de Claude Blanchet n’est pas illégal en soi —
le conjoint de Mme Marois nie d’ailleurs l’avoir commis —, la
révélation vient confirmer ce que bien des électeurs croient déjà. Selon
la boussole électorale de Radio-Canada, on fait encore moins confiance à
Pauline Marois, côté éthique, que Philippe Couillard (44 % contre 34 %
pour ce qui est du manque d’intégrité). C’est vous dire. Loin de
décourager le cynisme, les efforts du gouvernement sortant semblent au
contraire le cultiver.
Bref, un gouvernement péquiste majoritaire est non seulement hors de
portée, on peut croire que c’est l’élection même du PQ qui est désormais
remise en question. Mais au-delà des simples erreurs de campagne, cette
élection aura servi à détourner encore davantage le Parti québécois de
ses deux grandes raisons d’être : la souveraineté et la
social-démocratie.
Depuis l’entrée en scène remarquée de Pierre Karl Péladeau, et la
réaction paniquée qui a suivi, on ne donne plus cher de l’article « un »
du programme. Y a-t-il encore quelqu’un qui croit à un troisième
référendum ? Il y avait pourtant quelque chose d’absolument
rafraîchissant dans le geste spontané de la nouvelle recrue. La dernière
fois qu’un politicien s’est laissé aller à une démonstration aussi
enthousiaste doit bien dater du dernier référendum. On oubliait comment
la volonté d’aller de l’avant, plutôt que simplement de côté, donne du
« pep dans le soulier ». Allez, on n’a pas peur, semblait dire le poing
en l’air de PKP. Mais les efforts herculéens de l’équipe Marois pour
remettre le génie dans la bouteille ont aussitôt ramené la culture de la
peur, tout en minant la confiance qu’on peut avoir dans le PQ à l’égard
de la souveraineté.
Et puis, que dire de ramener Janette Bertrand, et les sombres
desseins qu’elle s’imagine, sur le devant de la scène ? On se pince en
pensant que c’est le parti de René Lévesque qui cherche à agiter de tels
épouvantails. Mme Bertrand, qui a beaucoup fait pour la société,
méritait une fin de carrière plus élégante. En plus de n’avoir à peu
près rien dit sur les choses qui comptent vraiment — la culture,
l’éducation, l’environnement —, le PQ a donc choisi de mettre le cap sur
ce qui divise les Québécois et, là aussi, cultive la peur.
Dans une autre tentative désespérée de compter des points auprès de
l’électorat francophone, le PQ dit maintenant vouloir invoquer la
« clause nonobstant » advenant des contestations juridiques de sa
charte. Comme il peut sembler loin le temps où un prédécesseur de
Pauline Marois, Lucien Bouchard, affirmait : « Je
veux pouvoir me lever, me regarder le matin en sachant que je n’ai pas
suspendu l’application des droits fondamentaux. Je veux que le Parti
québécois puisse se voir dans le miroir sans avoir à baisser les yeux. »
Je sais. Vous allez me dire que je m’acharne sur le PQ, encore une
fois. Pourquoi ne pas montrer Philippe Couillard du doigt plutôt ? Il
n’a pas grand-chose à dire, lui non plus. C’est vrai. Seulement, je n’ai
aucune attente envers le PLQ, qui m’apparaît en ce moment égal à
lui-même. Le PQ, c’est une tout autre histoire. Je suis de la génération
qui a vu le PQ apparaître comme un soleil à l’horizon, qui a applaudi
ses réformes et partagé, très souvent, ses objectifs. Le voir se vider
de sa substance comme de sa raison d’être se vit comme une espèce de
trahison.
Vous me direz que par sa nature hétéroclite, alliant la gauche et la
droite, le PQ a toujours été un peu caméléon, toujours prompt à mâcher
ses mots par rapport à la souveraineté. Pour ma part, je crois que la
transformation qui se remarque en ce moment au PQ va beaucoup plus loin.
Il y a 10 ans, il aurait été impensable de douter de l’avenir du Parti
québécois, mais aujourd’hui, la question se pose.
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